L'heure du déconfinement a soulevé et continue de soulever de nombreuses questions sur la reprise d'activités auprès des personnes âgées : si beaucoup souhaitent reprendre au plus vite, l'interrogation principale porte sur la manière de faire. La volonté de rompre l'isolement fait face au sentiment de responsabilité des acteurs et partout, des solutions sont recherchées pour allier plaisir et sécurité. Que ce soit par la mise en place de visites en bas de porte ou d'activités dans les cours des EHPAD, la volonté de tous est de mettre fin à la solitude de nos aînés.
Après trois semaines de déconfinement, la commission réseau du 28 mai a permis de continuer à partager nos expériences à travers les témoignages de deux associations : le CLARPA 56 dans le Morbihan et le Centre Social rural de Froissy-Crèvecoeur dans l'Oise qui ont maintenu le lien avec leurs bénéficiaires tout au long de cette crise
Estelle Lesager pour l'association CLARPA 56
Qu'avez-vous mis en place durant le confinement ?
Depuis 40 ans, le CLARPA est une fédération de clubs de retraités à portée départementale qui réunit des clubs se situant plutôt en milieu rural. Nos deux grands fondements sont la lutte contre l'isolement et la mise en place d'activités de loisirs.
Avec les annonces gouvernementales et la crise sanitaire qui menaçait, toutes nos activités se sont arrêtées début mars et nous nous sommes retrouvés avec un réseau en panne. La seule chose que nous pouvions faire était d'encourager tous les clubs à mettre en place des appels téléphoniques : nous avons pu remarquer que les deux tiers ont réalisé régulièrement ces appels, ce qui représente 80 clubs de retraités, et plus de la moitié est en contact avec le CCAS de leur ville.
Comment envisagez-vous la reprise d'activité ?
La reprise d'activité est compliquée de par la contrainte de 10 personnes maximum lors de rassemblements, et quand bien même ces mesures seraient assouplies, nous nous posons également la question de la responsabilité. En effet, nous ne souhaitons pas réunir un grand nombre de personnes fragiles car nous courions le risque de propager le virus à l'ensemble des retraités. Avec la mobilisation de tous et le manque de temps, nous n'avons pas eu l'occasion d'échanger au sein de la coopération, toutefois cela se met en place petit à petit. Cette semaine, les présidents des clubs de retraités se sont rassemblés en réunions téléphoniques pour aborder différents thèmes, notamment pour questionner la reprise d'activités telles que la marche ou la pétanque. Partager ensemble nous a permis de voir si nous avions bien identifié et pris en compte tout ce qui pourrait constituer un danger. Pour le moment, nous sommes donc encore dans la recherche de tous les risques potentiels et des solutions pour y pallier ; nous espérons également obtenir les recommandations des différentes institutions, comme le ministère des Sports, rapidement.
Annick Poitou, Fanny Sénéchal et Anaëlle Crochet pour le centre Social rural de Froissy-Crèvecoeur
Qu'avez vous mis en place pendant le confinement ?
Le territoire couvert par le centre social rural de Froissy-Crèvecoeur est un territoire de 38 communes, très rural. Durant le confinement, nous avons mis en place des appels téléphoniques, la livraison de courses à domicile et nous avons réouvert une plateforme web qui est un peu l'équivalent, à notre échelle, de Jeveuxaider.gouv.fr.
Avant cette crise sanitaire, nous avions pour habitude d'organiser des spectacles canapés. Le but était d'envoyer des artistes au domicile d'un sénior, pour jouer un spectacle à l'attention des invités du bénéficiaire et du centre social. Ces spectacles ont continué ! Pour cela, nous avons formé nos aînés pour qu'ils puissent utiliser la plateforme Zoom, ce qui a été rendu possible grâce à la conférence des financeurs et au dispositif Séniors Connectés, qui nous permet d'équiper les séniors isolés en outils numériques. Avant le confinement, Anaëlle allait au domicile pour les aider à se familiariser avec ceux-ci mais elle a du s'adapter au contexte actuel en appelant les personnes individuellement. Aussi, une fois nos bénéficiaire formés, nous avons pu passer par cette plateforme pour organiser des rencontres virtuelles à raison d'une fois par semaine, durant lesquelles nous échangions sur les nouvelles informations du centre social et les idées d'activités de chacun. Finalement, nous nous servons aussi parallèlement de l'outil Discord afin de pouvoir se parler directement par messages ; nos séniors se connectent dessus petit à petit.
Cela a toutefois ses limites et nous ressentons la nécessité d'un lien en présentiel.
Comment envisagez-vous la reprise d'activité ?
Il y a trois semaines, nous nous sommes penchés sur ce besoin d'actions en présentiel. De cette réflexion, sont nés deux projets. Le premier est un "portage de sourire" par lequel nous souhaitons remettre en place les visites à domicile, avec toutes les mesures sanitaires. Cela prendrait la forme de visites en bas de porte pour permettre aux séniors de revoir des visages, ce qui n'est pas arrivé depuis deux mois pour beaucoup. Pour ce faire, nous allons mettre en place des kits déstinés à nos bénévoles comportant chacun un gel hydroalcoolique, trois masques en tissu et une chaise pliante pour leur permettre de s'asseoir et de discuter avec les bénéficiaires devant leur porte. C'est important pour nous que les bénévoles ne rentrent pas dans le domicile afin de limiter les risques de contamination. Cette action permet de rompre la solitude dans laquelle sont plongés nos aînés depuis plus de deux mois ; l'idée est d'aller les rencontrer pour leur apporter un sourire et de la chaleur, afin de les rassurer et de leur redonner goût à la vie sociale. Pour le moment, 7 bénévoles sont volontaires et recommenceront les visites la semaine du 1er juin. Par la suite, nous aimerions qu'un artiste accompagne chaque bénévole lors des visites afin de chanter ou de conter une histoire pour partager un moment de complicité.
Notre deuxième projet est un projet de balades en petits groupes de moins de 10 personnes menés par une animatrice ; dans un premier temps nous allons organiser deux sorties. Aussi, le 27 juin, nous aimerions organiser une balade contée : la partie de marche durerait environ 30 minutes avant d'arriver à un point de passage où se trouveraient deux artistes de la compagnie bAlllAd racontant des histoires improvisées en musique. Les séniors auraient un casque audio chacun et ils auraient la possibilité de prendre part à l'histoire. Par la suite, un goûter serait partagé, avec chacun un sachet individuel préparé à l'avance contenant de l'eau, du jus de fruit, un produit laitier et un produit céréalier pour rappeler l'importance d'une bonne alimentation et de bien s'hydrater. Le tout en respectant les mesures barrières et en prenant soin de désinfecter tout le matériel.
Liens pour en savoir plus sur :
- la ballade contée : https://www.dropbox.com/s/1uf9p0gwzznqhhx/Histoires.mov?dl=0
- la coopération du Morbihan : https://monalisa-asso.fr/mobilisation-cooperations-departementales/item/cooperation-departementale-morbihan
- la coopération de l'Oise : https://monalisa-asso.fr/mobilisation-cooperations-departementales/item/cooperation-territoriale-oise
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